Mort pour un Baiser

Jean marchait rapidement dans la rue, il était heureux, son visage brillait de sourires. Il faisait beau, y avait plein de ciel bleu et de soleil dans l'air un peu vif du début d’automne. Grand, mince, beau mec aux tempes argentées, il ne laissait pas les regards des femmes indifférants. Ce soir, il fêtait avec sa femme Hélène, l'anniversaire de leur première rencontre. C'était il y a 14 ans, un soir chez des amis communs...Ils avaient été les victimes heureuses d'un coup d'amour foudroyant, juste le temps d'un regard et d'un sourire. Jean touchait à travers son Loden bleu marine, le petit coffret qui s'y trouvait...Ce soir, son grand et unique amour aller être heureux, lorsqu'il lui offrirait cette bague d'or blanc ciselée, montée d'une très belle émeraude. Hélène en rêvait depuis trois ans, mais son prix était inaccessible. Alors, Jean mangeât pendant trois longues années des sandwichs les midis, au lieu du resto avec les collègues. Il économisa sans arrêt le moindre euro, et ainsi, il put verser au bijoutier du quartier, la coquette somme de onze-mille euros...Rien que de penser à la réaction de son amour en ouvrant le coffret de bois d’acajou finement sculpté, contenant ce trésor aux éclats d'argent et aux reflets verts de toute beauté. La joie le submergea violemment, telle une onde de Lumière, elle éclata dans sa tête, et le rendit heureux si fort, qu'il lui semblât flotter dans l'air en marchand.

Jean pressa le pas, il voulait entrer avant Hélène pour préparer le champagne, les petits fours, la musique. Il avait prévu aussi un bel éclairage romantique. Il prit la rue des Meuniers, et en regardant vers sa boulangerie sur le trottoir d'en face. Il vit Hélène, sa jolie blonde qui en sortait en souriant heureuse à un bel homme en costume beige, qui l'attendait près de la vitrine de la boulangerie...Ils s’approchèrent l'un de l'autre et s’embrassèrent sur la bouche.

Tout s'écroula d'un coup pour Jean...Il faillit presque éclater d'un rire nerveux. Il ne croyait pas ce qu'il voyait. Sa tête venait d'exploser, c'était impossible, ça devait être un mauvais un mauvais rêve, un cauchemard qu'il vivait en cet instant. Tout changeait en lui, il revit les magnifiques yeux bleus amoureux d’Hélène, quand hier soir après l'amour, elle lui avait dit qu'elle ne pourrait jamais vivre sans lui. Et pis d'un coup, il ressentit un choc brutal dans sa tête, comme s'il se prenait le TGV en pleine gueule. Il rebroussa chemin, et prit en courant comme un dératé la rue Marcelline.

Mort pour un Baiser

L'horreur de vivre dans cette souffrance permanente de la trahison d'Hélène le bouleversa. Il ressentit une émotion inconnue d'une puissance incontrôlable...Tout ce gris sale qui envahissait son âme, faisait naitre en lui la haine de vivre. Arrivait chez lui essoufflé, il en était au dégout d'exister. Son visage ravagé par le chagrin, n'était que larmes. Il écrivit un petit mot sur un post-tit, et déposa près de celui-ci. Le coffret de bois rouge. Toujours vêtu de son loden , il alla dans le placard, ouvrit une vieille boite à chaussure, en retira l'arme, un vieux colt à six coups. Il repartit au salon et dans le tiroir du buffet pris une balle, chargea le barillet, mis le canon sur sa tempe et sans hésiter appuya sur la gâchette. Juste pour faire disparaitre cette vision d'horreur qui le torturait : Le baiser de sang.

Hélène ne put supporter cela, le choque, véritable traumatisme qu'elle à vécu en voyant le corps de Jean baignant dans une marre de sang...Mais le pire après, ce qui la rendit définitivement folle. Fut la raison du suicide de Jean, que révélaient ses mots hâtivement écrits sur le papier rose. Depuis ce drame, Hélène est internée à vie dans un hôpital psychiatrique. Elle passe ses journées assise dans son fauteuil face au mur blanc de sa chambre. Dans un mouvement lancinant d’avant en arrière, elle répète immuablement, inlassablement, une litanie à haute voix, les mots de Jean laissés sur le post-it,

« Je t'ai vu embrasser l’homme devant la boulangerie...Adieu. »

Elle parle au mur, juste pour demander pardon à Jean...Avec ses larmes, sur le blanc du mur, elle dessine des arabesques de remords. Elle est persuadée, qu'un jour, il sortira du mur pour la prendre dans ses bras, et tout recommencer comme avant.

Ce que n'a jamais su Jean, est que cet homme était un grand ami d'enfance d' Hélène, du temps des cours d'art dramatique de leur Jeunesse, et que leur baiser était un faux baiser, juste un baiser platonique d'acteur de théâtre. C'était leur façon de se dire bonjour, dans une complicité rigolarde...Il ne savait pas non plus que Simon, ce bel homme, l’ami d’Hélène, était homosexuel jusqu'au bout des ongles...Mais surtout, ce qu'il ne savait pas à ce moment là...C'est qu’Hélène l'aimait plus que tout, et qu'il était son seul et unique Amour.

""Parfois, les âmes des amours brisés, disparus, massacrés viennent me rendre visite pour pleurer le temps d'un rêve musical sur les courbes de mon cœur, juste pour y trouver refuge, rien que le temps d'une chanson...Je ne peux me retenir d'accompagner leurs chagrins avec les larmes de mes mots. ""

Moi, l’orphelin abandonné des « je t'aime », et des regards amoureux, je n'oublie jamais. "qu'il y a des rêves qui pleurent, parce qu'il y a des rêves qui meurent." C'est la vie.

Chanson, qui m'a inspira cette histoire.

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